LE PRINCIPE DU CANTONNEMENT DES PATRIMOINES ET LES NOTIONS DE PROVISIONS TECHNIQUES EN MUTUALITE SOCIALE
LE
PRINCIPE DU CANTONNEMENT DES PATRIMOINES ET LES NOTIONS DE PROVISIONS
TECHNIQUES EN MUTUALITE SOCIALE
Cette note a pour
objet de rappeler et d’expliciter deux points importants dans la gestion des
mutuelles sociales et relatifs :
· au Cantonnement des
patrimoines,
· aux provisions
techniques des mutuelles.
1° LE PRINCIPE DU
CANTONNEMENT DES PATRIMOINES
Le Règlement N°7/UEMOA/2009
du 29 Juin 2009 relatif à la mutualité sociale et ses Règlements d’exécution
notamment celui N°3/2011 du 31 Aout 2011 relatif aux règles prudentielles
portant sur les risques courts, aux mécanismes de garantie et au contrôle du
fonctionnement des mutuelles sociales et leurs structures faitières, ont
précisé l’objet de la mutuelle sociale mais aussi sa possibilité d’avoir, à
titre accessoire des activités sanitaires et sociales.
Cette opportunité
ouvre malheureusement une brèche à la confusion : ainsi, il arrive souvent
de considérer la mutuelle comme une entreprise qui se développe en branches
d’activités diverses, et qui dans sa gestion confond toutes les charges et les
produits, confond les patrimoines, la trésorerie etc.
C’est important de
rappeler les principes y relatifs édictés par les Règlements de l’UEMOA, en
l’occurrence celui du cantonnement des patrimoines.
L’Article 11 du Règlement N°3/2011 du 31 Aout 2011
stipule « Les mutuelles sociales et leurs structures faîtières ont la
possibilité, à titre accessoire, de gérer des œuvres sanitaires et sociales et
d'exercer des activités génératrices de revenus conformément à la réglementation
en vigueur dans chaque Etat membre de l'Union ». D’ores et déjà et cela va
de soi, toute autre activité que la prestation de sa santé est à titre
accessoire pour la Mutuelle.
L’Article 12 du même règlement précise « La gestion
des activités autres que l'assurance maladie conformes à l'objet des mutuelles
sociales et de leurs structures faîtières, doit se faire sur la base du
principe de cantonnement des
patrimoines et de séparation des opérations.
Les activités du même
type, qui sont étrangères à l'objet des mutuelles sociales et de leurs
structures faîtières et pour lesquelles les prestations ne sont pas
exclusivement servies aux membres, doivent être gérées selon le principe de la séparation des personnalités juridiques ».
Ainsi, trois points
importants se présentent :
Ø la séparation des
personnalités juridiques :
A l’instar de la mutuelle qui a une
personnalité juridique, toute activité annexe doit faire l’objet d’une demande
de personnalité juridique aux autorités compétentes en ladite matière. Par
exemple, pour un magasin de vente de produits de consommation, les
autorisations du MEFP, du Ministère de l’Intérieur (association) et du
Ministère du Commerce sont requises. Cette personnalité rend l’activité tout à
fait indépendante de la Mutuelle, même si c’est sous l’initiative et
l’encadrement de celle-ci.
Ø
le cantonnement des patrimoines
De la séparation de personnalités, découle tout
naturellement la séparation des patrimoines. En l’occurrence, les biens meubles
et immeubles, le fonds mutualiste, la trésorerie etc, bref tout ce qui est du ressort
du patrimoine de la mutuelle est très distinctement différent des biens
immobiliers acquis par et pour l’activité annexe. En cas de faillite par
exemple du commerce, la liquidation ne concernera pas le patrimoine de la
mutuelle, et réciproquement.
Ø
la séparation des opérations
Ce point concerne la traçabilité des opérations
à travers le système comptable. Chaque entité (la Mutuelle et l’Activité
annexe) dispose de sa propre comptabilité dans ses propres livres et journaux
comptables, ses propres comptes bancaires, sa propre caisse.
La Mutuelle du
Trésor gère avec le Groupe NSIA la retraite complémentaire de ses adhérents à
travers une Convention. Ainsi elle collecte les cotisations par précomptes de
la DGCPT sur les avantages des adhérents à la convention, et les reverse à
NSIA. Cette activité ne nécessite pas pour l’heure une organisation spécifique,
mais la séparation des patrimoines et des opérations apparait très nettement.
La gestion du
restaurant suit aussi la même logique de cantonnement des patrimoines et de
séparation des opérations, bien que toutes la gestion et les opérations du restaurant
est assurée par les mêmes responsables de la Mutuelle. Cela devra changer si la
mutuelle aura son propre restaurant, ou si dans le cadre de la gestion de
l’actuel restaurant, la MT avait toute l’autonomie.
L’Article 13 précise
les règles d’exercice des activités génératrices de revenus.
« L'exercice
des activités génératrices de revenus est soumis au respect scrupuleux des
règles suivantes:
Ø l'activité
génératrice de revenus ne doit pas comporter de risques pouvant mettre en péril
l'activité d'assurance;
Ø
les opérations relevant de ces activités génératrices de
revenus doivent être comptabilisées séparément;
Ø
les pertes éventuelles liées à l'activité génératrice de
revenus ne doivent pas être couvertes par les cotisations d'assurance ni les
réserves constituées par la mutuelle sociale;
Ø les activités
envisagées doivent présenter un intérêt économique et social pour la communauté
des adhérents ».
Globalement, ces
règles précisent les dispositions précédentes mais annoncent trois nouveaux points
importants.
· ‘’Pas de risques
pouvant mettre en péril l’activité d’assurance’’
·
‘’Les pertes éventuelles liées à l'activité génératrice de
revenus ne doivent pas être couvertes par les cotisations d'assurance ni les
réserves’’. Cela signifie que la Mutuelle ne doit en aucune manière
prélever de ses ressources pour soutenir l’A G R. A contrario, le flux inverse
est possible.
· ‘’L’intérêt
économique et social’’. l’Activité doit revêtir un intérêt certain pour la
Mutuelle, par exemple en plus du service social qu’elle apporte, générer de
ressources dont peut bénéficier la Mutuelle. Si la Mutuelle ne doit rien donner
à l’AGR, l’AGR doit être en mesure d’apporter des ressources à la Mutuelle. La
comptabilisation des opérations de part et d’autre ne pose aucun problème aux
comptables concernés
2° LES PROVISIONS TECHNIQUES
Il
faut d’abord préciser que les provisions dont il s’agit ici sont différentes
des provisions connues par le SYSCOA et le PCMS, et relatives par exemples aux
dépréciations, aux stocks, aux clients notamment douteux, aux pertes diverses
etc… La comptabilité de la mutuelle retracera aussi ces provisions au même
titre qu’une entreprise.
Les
provisions dont il s’agit ici sont dites « Provisions techniques »
clairement explicitées par :
v le
Règlement N°3/2011 du 31 Aout 2011 relatif aux règles
prudentielles portant sur les risques courts, aux mécanismes de garantie et au,
contrôle du fonctionnement sociales et leurs structures faitières, ont précisé
l’objet de la mutuelle sociale mais aussi sa possibilité d’avoir, à titre
accessoire des activités sanitaires et sociales.
v le
Règlement N°3/2012 du 10 Mai 2012 relatif au Plan
Comptable des Mutuelles sociales (PCMS)
2.1 Le Règlement N°3/2011 du 31 Aout
2011
L’article 7 stipule
« Les mutuelles sociales et leurs structures faîtières doivent, à tout
moment, être en mesure de pouvoir justifier de la constitution de provisions
techniques suffisantes pour le règlement intégral de leurs engagements
vis-à-vis des bénéficiaires ».
L’article 8 définit
les provisions techniques comme suit :
v « la
provision pour risques en cours destinée à couvrir les risques et les frais
afférents à la période comprise entre la date de l'inventaire et la prochaine
échéance de cotisation ;
v la provision
pour prestations à payer représentant la valeur estimative des dépenses en
principal et en frais nécessaires au règlement de tous les sinistres survenus
avant la clôture de l'exercice mais non encore réglés;
v toutes
autres provisions techniques qui peuvent être fixées par la Commission de
l'UEMOA ».
2.2 Le Plan comptable des mutuelles sociales
Le
PCMS est revenu de façon plus explicite sur les provisions techniques en
indiquant « qu’en assurance maladie, le terme de ‘’ provisions
techniques’’ sert à distinguer les engagements vis-à-vis des adhérents et
des bénéficiaires des prestations couvertes par la mutuelle. Ce type de
provisions se distingue des provisions réglementées, des provisions pour
risques, et des provisions pour dépréciations ».
Reprenant
l’article 8 du Règlement N° 3/2011, le
PCMS précise les différentes sortes de provisions techniques.
a) Provision pour prestations maladie à
payer :
« La
provision pour prestations maladie à payer est une estimation faite à la
clôture de l’exercice, qui concerne les prestations maladie de la mutuelle, et
qui sert à couvrir des charges certaines mais non maîtrisées dans leur montant
(prestations tardives mais non encore déclarées).
C’est
la valeur estimative des dépenses maladie encourues, pour les dossiers non
liquidés à la date de l’inventaire. Elle est calculée exercice par exercice.
Cette
provision constitue une estimation. Elle est évaluée dossier par dossier. Elle
est destinée à couvrir le coût des dossiers des maladies survenues au
cours de l’exercice inventorié mais non encore déclarées à la mutuelle à
la date d’inventaire [voir règles spécifiques d’évaluation des provisions
techniques »
En
termes plus simples, il s’agit d’estimer le montant des dépenses de prestations
maladies dont les dossiers de maladies survenues (on est au courant que tel mutualiste
est en cours de traitement) sont parvenus à la mutuelle et non encore liquidés
au moment de l’inventaire de fin d’exercice. Comme il faut rapporter les
charges à chaque exercice, le comptable constitue une provision pour prestation
maladie. Le calcul de cette provision qui est fait par dossier est très
complexe mais il est permis de le faire à partir du ‘’Cout moyen des dossiers
(CMD)’’.
Il
est important de former les responsables, notamment les comptables des
mutuelles en particulier complémentaires sur le PCM et spécifiquement sur les
provisions techniques qu’aucune mutuelle n’intègre dans ses états financiers.
b) Provisions pour risques en cours :
« La
provision pour risques en cours est destinée à couvrir, pour l’ensemble des
contrats en cours des adhérents, la charge des sinistres et des frais
afférents, pour la période comprise entre la date de l'inventaire et la
prochaine échéance de cotisation (lorsque le contrat annuel n’échoit pas à
la date de l’inventaire) ».
La
prise en compte de ce type de provision n’est pas encore à l’ordre du jour pour
nos mutuelles sociales et n’entre pas en compte dans les cotisations, mais la
mutualité prévoit les sinistres et les épidémies pour lesquels, il faudra
constituer des provisions.
c) Provision mathématique :
« La
provision mathématique est une estimation faite à la clôture de l’exercice, et
qui concerne certaines catégories de prestations de la mutuelle. La provision
mathématique est la différence entre la valeur actuelle de l’engagement
pris par la mutuelle (prestation garantie) et la valeur actuelle de
l’engagement de l’adhérent (cotisations à payer). Elle est calculée
selon les techniques actuarielles propres à chacun des risques garantis d’après
une table de mortalité, un taux d’intérêt technique et des chargements de
gestion ».
D’apparence
simple, le calcul de la provision mathématique est beaucoup plus difficile car
faisant appel à des techniques actuarielles (intégrant de nombreux paramètres).
Globalement
concernant les provisions techniques, il s’agit de nous concentrer sur les
provisions pour risques maladies à payer, et assurer une formation des
dirigeants en particulier des comptables sur leur notion et leur mode de
calcul.
La
prise en compte de ces provisions techniques traduit mieux le concept de comptabilité
d’engagement qui est différente de la comptabilité de trésorerie.
Le
PCMS définit ces comptabilités comme suit :
Ø Comptabilité de trésorerie :
« Modalités de comptabilisation des opérations dérogatoires
par rapport aux normes comptables de droit commun (les IAS pour
« International Accounting Standards »). Ces modalités -basées sur
l’enregistrement des recettes et des dépenses – ne sont admises que pour les
très petites mutuelles dont les cotisations reçues annuellement et le nombre d’adhérents,
ne dépassent pas certains seuils.
Cette comptabilité de trésorerie répond toutefois à des conditions
de forme et de fond ».
Ø Comptabilité d’engagement :
« Une
comptabilité qui tient compte de toutes les charges et de tous les produits
engagés au titre d’un exercice social, quelle que soit la date de règlement de
la charge ou d’encaissement du produit.
Elle
s’oppose à la comptabilité de trésorerie ».
Le 15 Janvier 2019
Raymond
Diégane NDONG
Secrétaire chargé des Relations Extérieures, de la Formation et de la Communication
(SREFC)
de la mutuelle du Trésor
(Sénégal) |
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